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Stratégie d'influence des USA sur l'Union Européenne pour l'exportation des volailles décontaminées au chlore.

Cela fait quinze ans que les USA veulent exporter en Europe leurs volailles ayant été décontaminées à l'aide produits chlorés, en fin de chaîne de fabrication. L'Union Européenne refuse et préfère appliquer le principe de précaution tant que les experts scientifiques n'auront pas démontré que l'usage des produits chlorés est inoffensif pour le consommateur. Les exportateurs américains font pression sur l'UE et profitent du manque de données scientifiques pour porter plainte à l'Organisation Mondiale du Commerce arguant que les mesures d’interdiction européennes ne sont pas justifiées. Ils espèrent ainsi entrer sur ce vaste marché estimés à plus de 100 millions d'euros par an...

Depuis 1997, pour des raisons de sécurité alimentaire, l'Union Européenne maintient un embargo sur l'importation des volailles ayant été désinfectées par des substances chimiques à base chlore. En 2007, à la création du Conseil Economique Transatlantique, les Etats-Unis font pression sur la Commission européenne pour la levée de l'embargo. Ils profitent du manque d'information dont dispose l'UE au sujet de l'utilisation des solutions chlorées pour la décontamination des carcasses de volailles pour tenter d'imposer leur viande à faible coût de production. En 2008, les différents Experts scientifiques encouragent l'approfondissement des recherches et déclarent que "les connaissances actuelles concernant les effets négatifs potentiels de l'utilisation de différents biocides étaient insuffisantes pour pouvoir procéder à des évaluations quantitatives complètes. Par conséquent, il ne peut être exclu que l'autorisation de ces substances entraîne une résistance antimicrobienne accrue chez l'homme". En conséquence, l'absence de données scientifiques suffisantes relatives aux dangers liés à l'utilisation de ces substances conduit à appliquer le principe de précaution. Début 2009, les États-Unis estimant que ce traitement chimique ne pose pas de problème pour la santé des consommateurs et que les mesures d’interdiction européennes ne sont pas justifiées, ont porté plainte à l'Organisation Mondiale du Commerce. S'engage alors un rapport de force entre, d’une part, la protection des consommateurs de l’Union Européenne et le maintien du « modèle » sanitaire européen et d'autre part les intérêts économiques américains estimés à plus de 100 millions d'euros par an... Le contentieux sur le «poulet chloré» est toujours en cours d'étude à l'OMC.

Retour sur les mécanismes d'influence mis en œuvre par les USA :

- Depuis 1997, il existe un vieux contentieux dans lequel l'Union Européenne refuse d’importer en Europe des poulets décontaminés avec des produits chlorés. En 2007, est créé le Conseil Economique Transatlantique. Les USA et le lobby des producteurs de poulets font pression sur le vice-président de la Commission européenne, Gunther Verheugen pour la levée de l'embargo. - En mars 2008, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) ainsi que deux comités scientifiques des risques sanitaires (le CSRSE et le CSRSEN) encouragent l'approfondissement des recherches en déclarant que "les connaissances actuelles concernant les effets négatifs potentiels de l'utilisation de différents biocides étaient insuffisantes pour pouvoir procéder à des évaluations quantitatives complètes. Par conséquent, il ne peut être exclu que l'autorisation de ces substances entraîne une résistance antimicrobienne accrue chez l'homme". - En mai 2008, le Commissaire européen Günter Verheugen propose une modification du règlement sur les conditions de traitement sanitaire des carcasses de volailles. Cette proposition autoriserait l'importation de "poulet chloré" américain, qui était frappé d'un embargo depuis 1997. Selon la chambre de commerce américaine, l'exportation de poulet pourrait représenter jusqu'à 117 millions d'euros par an. - Dans une résolution votée le 29 juin 2008, le Parlement européen s’opposait à la levée de l’interdiction d’importation. Mais à l'approche du sommet UE-Etats-Unis, la Commission européenne avait cédé à la demande de ces derniers d'autoriser provisoirement et sous conditions l'utilisation de certaines substances antimicrobiennes pour décontaminer les carcasses de volailles. Toutefois, elle recommandait fortement le réalisation d'études approfondies sur les impacts liés à l'utilisation de solutions chlorées de décontamination des volailles (recommandation de l' EFSA) ainsi qu'une information aux consommateurs, sur l'étiquette des produits. - Le 18 décembre 2008, le Conseil agriculture rejette cette proposition l’unanimité des États membres. La totalité des pays européens est opposée à l’introduction de ces poulets sur le marché européen. L'absence de données scientifiques suffisantes relatives aux dangers liés à l'utilisation de ces substances conduit à appliquer le principe de précaution(1). La technique américaine qui consiste à tremper les carcasses en bout de chaîne dans une solution javellisée dispense de pratiquer des contrôles d'hygiène rigoureux en amont, ce que la loi européenne impose au contraire pour prévenir les risques de contamination. Au delà des risques pour les consommateurs, la Commission Européenne souligne que plusieurs substances antimicrobiennes telles que le dioxyde de chlore, le chlorure de sodium acidifié, le phosphate trisodique ou les acides peroxydés, qui sont utilisées pour éliminer la contamination de surface des carcasses de volailles, peuvent présenter un risque pour l'environnement aquatique, la santé du personnel travaillant dans les installations des eaux usées, ainsi que le fonctionnement et l'efficacité des réseaux d'assainissement. - Le 16 février 2009, les États-Unis décident de déposer un recours devant l’Organisation Mondiale du Commerce contre la décision européenne de refus d’importer en Europe des poulets décontaminés avec des produits chlorés. "Ce recours à l'OMC et la constitution d'une équipe internationale d'experts sera cependant l’occasion pour nous de défendre la légitimité de notre modèle sanitaire européen, qui est conforme aux règles du commerce international. Nous avons notre modèle sanitaire et alimentaire : le poulet chloré ne répond pas à ses exigences. " a indiqué Bruno LE MAIRE en déplacement aux États-Unis. - En mars 2012, le dossier du contentieux "Affaire DS389" opposant les États-Unis et les Communautés européennes est toujours en cours d'instruction(2) à l'Organisation Mondiale du Commerce.

L'avenir nous dira si le groupe d'experts s'appuyant sur de nouvelles analyses scientifiques permettra de déterminer que l'utilisation des solutions chlorées est sans risque pour la santé des consommateurs, que les producteurs américains ont adapté leurs infrastructures aux normes sanitaires européennes et que les impacts sur l'environnement peuvent être maîtrisés. Et finalement, les sages de l'OMC auront à convaincre que la levée de l'embargo sur le poulet chloré américain sera sans effets notables sur l'emploi dans la filière volaille des pays membres de l'Union européenne...

(1) : Source : Décision du Conseil de l'Union Européenne du 09 décembre 2008 rejetant la proposition de la Commission concernant l'utilisation de substances antimicrobiennes pour éliminer la contamination de surface des carcasses de volailles). (2) : Source : Organisation Mondiale du Commerce : http://www.wto.org/french/tratop_f/dispu_f/cases_f/ds389_f.htm).

Eric HANSEN

Stratégie d'influence des USA sur l'Union Européenne pour l'exportation des volailles décontaminées au chlore.

Stratégie d'influence des USA sur l'Union Européenne pour l'exportation des volailles décontaminées au chlore.

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